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ALLIAIRE OFFICINALE

ALLIAIRE OFFICINALE

Alliaria petiolata Cavara & Grande

Alliaria officinalis Andrz

Syn : Sisymbrium alliaria L.

Article révisé en Août 2019

Alliaire près de la Source des Nincrées
à CHITRY, 89 Yonne

Noms vernaculaires :

Alliaire, Herbe à Ail, Herbe aux aulx, Vélar alliaire, Julienne alliaire

BOTANIQUE 

Famille des Brassicacées (Crucifères)

Plante bisannuelle de 70-90 cm, glabre ; feuilles à long pétiole, cordiformes et dentelées, terminées en pointes, dégageant une odeur d’ail quand on les froisse ; fleurs blanches en petites grappes, 4 pétales en croix de 4-6mm ; 6 étamines ; le fruit est une silique, contenant des graines nues.

HABITAT 

L’Alliaire aime les sous-bois frais de feuillus, sur des plateaux calcaires ; dans les taillis ; et dans les vallées alluviales, les endroits humides à proximité des rivières et des fontaines.

Plante bio-indicatrice de sols plus ou moins engorgés en matière organique végétale archaïque. Elle est devenue invasive aux USA et au Canada, où sa présence réduit les ectomycorhizes dans les forêts de pins.

USAGE MEDICINAL 

1) Historique et usages traditionnels :

La plante semble ne pas avoir retenu l’attention des Anciens.
Dans les campagnes, elle a surtout été consommée comme plante alimentaire et appréciée pour son odeur alliacée.

Joachim CAMERARIUS (Le Jeune) qui étudia la médecine et la botanique en Italie à l’époque de la Renaissance, puis exerça à Nuremberg, est un des premiers à avoir utilisé l’Alliaire pour déterger des ulcères gangréneux des jambes ; il prétendait aussi avoir traité des carcinomes.

MERAT au XVIII° siècle dit que la plante a été employée comme « vermifuge, antiscorbutique et antiseptique ». « On l’a donnée dans l’asthme, ainsi que ses semences contre la pituite. A l’extérieur on l’a appliquée, pour empêcher la gangrène, sur les ulcères malins ».

Au XIX° siècle, CAZIN énumère les propriétés de l’Alliaire qui est une plante « stimulante, diaphorétique, béchique-incisive, diurétique, détersive, antiputride, antiscorbutique ». Mais il précise ensuite ses indications : « La décoction d’alliaire fraichement cueillie est très expectorante et agit plus fortement que celle du vélar (Erysimum offic.). L’emploi que j’en ai fait sur la fin des catarrhes pulmonaires chroniques, dans l’asthme humide et dans la phtisie, a confirmé cette opinion ». Il cite son action diurétique dans un cas d’hydrothorax avec oedèmes des membres inférieurs. Son suc déterge et vient à bout de la suppuration des « ulcères sordides et gangréneux », tout en favorisant la cicatrisation.

Henri LECLERC, qui fut médecin militaire sur le front de l’Yser en Octobre 1914, traita chez des soldats des ulcères des pieds provoqués par le gel avec de l’alcoolature d’alliaire diluée. Il put en vérifier « sa réelle efficacité comme antiputride et comme stimulant des tissus ». « La suppuration diminuait, les fongosités se détergeaient et faisaient place à des granulations normalement vascularisées et l’on voyait souvent se produire une réfection très rapide de l’épiderme ».

2) Composition & Pharmacologie 

Comme d’autres crucifères (Moutarde noire, Brocoli, Chou de Bruxelles, Erysimum...) et certaines alliacées, l’Alliaire contient des Sénévols, qui sont des hétérosides c’est-à-dire le couplage d’un « sucre » avec une aglycone, en l’occurrence ici : un radical soufré (ou thiol).

Le principal sénévol est la Sinigrine  ; celle-ci, lorsque la plante est écrasée, se trouve mise en contact avec la myrosine qui est une enzyme (une diastase hydrolysante) appelée maintenant myrosinase. Cet enzyme dégrade la Sinigrine en Isothiocyanate d’allyle. Cette substance soufrée est responsable du goût piquant de la plante, car est est irritante pour les papilles gustatives, tout comme l’huile de moutarde. Comme elle est volatile, elle « vous monte au nez ».

La Sinigrine est anti-oxydante, anti-bactérienne et antifongique ; elle est aussi anti-inflammatoire, et aurait une action préventive sur la carcinogenèse.

L’Isothiocyanate d’allyle est une substance de défense de la plante contre les herbivores qu’elle décourage de la brouter. Elle est lacrymogène, antibactérienne, et nématicide (active contre les vers ronds). Mais elle est également neurotoxique à forte dose, et abortive.

L’Alliaire contient aussi beaucoup de Vitamine C (260 mg/100g) ce qui valide son usage pour prévenir le scorbut.

Alliaire dans le Val du Buisson
à CRAVANT, 89 Yonne

3) INDICATIONS THERAPEUTIQUES de l’ALLIAIRE :

=> C’est une plante fortifiante-revitalisante grâce à son taux élevé en Vitamine C ; elle est antiscorbutique.

=> Elle a surtout été utilisée dans les campagnes comme expectorante, favorisant la résolution des trachéites et bronchites . Dès qu’on peut en disposer après l’hiver, elle peut remplacer le fameux VELAR officinal ou Herbe aux chantres (appelé encore Sisymbre officinal ou Erysimum) qui est la référence pour traiter les laryngites avec aphonie et trachéites printanières ; car elle en possède les mêmes vertus.

=> C’est un antiseptique local puissant capable d’arrêter des suppurations, tout en assurant la détersion, et en favorisant la cicatrisation. Elle est indiquée en décoction pour laver des plaies purulentes, et guérir des ulcères putrides (comme le Choux, une autre crucifère)

USAGE CULINAIRE 

 les feuilles jeunes se mangent en salade, ou écrasées crues sur une tartine beurrée
 les feuilles cuites et broyées font d’excellentes soupes au goût alliacé,
à adoucir avec des pommes de terre
 les graines contenues dans les siliques, pilées dans un mortier, peuvent servir de moutarde.

RECOLTE

L’Alliaire se récolte au printemps, dans des lieux non-contaminés par les pesticides agricoles ; il faut utiliser la plante fraîche car la dessiccation lui fait perdre ses propriétés.
On peut récolter les siliques à maturité en fin d’été, pour en recueillir les graines.

EMPLOI MEDICINAL et POSOLOGIE

 en INFUSION de plante fraîche : 30-50 g par litre d’eau (30-60 g/L. pour CAZIN ; 20-60 g/L. pour FOURNIER) pour en cas de laryngite, avec enrouement ou aphonie, ou de trachéo-bronchite, contractée au printemps. ; à associer à la MAUVE comme adoucissant de la gorge, ou à des plantes expectorantes comme le LIERRE TERRESTRE (GLECHOMA), le BOUILLON BLANC, ou le TUSSILAGE.

 en JUS de PLANTES écrasées, directement versé sur un ulcère purulent.

 en DECOCTION de feuilles fraiches : à 100 g/ litre pour usage externe :

en lavage de plaie ou d’ulcère, puis en compresses imbibées ; associée à de l’Eau miellée, ou relayée par du MIEL de THYM.

PHARMACOPEE FRANÇAISE 

Liste A (ansm 04/01/2019)

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 

1) Bibliographie générale :

H. LECLERC « Précis de Phytothérapie » p. 267-268

Paul-Victor FOURNIER « Dictionnaire des Plantes médicinales et vénéneuses de France » 1947, ré-éd. 2010, p. 71-72

Pierre LIEUTAGHI « Le Livre des bonnes herbes » p. 63-64

Gérard DUCERF « L’encyclopédie des Plantes bio-indicatrices » p. 71

Clotilde BOISVERT « Plantes et remèdes naturels » p. 70

2) Ouvrages anciens :

François-Victor MERAT, Adrien-Jacques DE LENS « Dictionnaire universel de matière médicale et de thérapeutique générale » Paris, 1831, Vol 3, p. 146

François-Joseph CAZIN « Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes » 1868, p. 53-54

3) Articles scientifiques :

(articles classés en ordre chronologique, des plus anciens aux plus récents) :

LIN CM, PRESTON JF 3rd, WEI CL « Antibacterial mechanism of allyl isothiocyanate » J. Food Prot. 2000 Jun ; 63(6) : 727-34

JIE M, CHEUNG WM, YU V, ZHOU Y, TONG PH, HO JWS « Anti-proliferative activities of sinigrin on carcinogen-induced hepatotocicity in rats » PLoS ONE 2014 Oct 20 ; 9(10) :e110145

MAZUMDER A, DWIVEDI A, DU PLESSIS J. « Sinigrin ands its Therapeutic Benefits » Molecules, 2016 March, 29 ; 21 (4) : 416

WEBOGRAPHIE 

www.fr.wikipedia.org
www.wikiphyto.org
www.bien-etre-naturel.info
www.mr-plantes.com

Par Dr Dom COQUERET

Le dimanche 30 juillet 2017

Mis à jour le 13 août 2019