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MELITTE A FEUILLES DE MELISSE

MELITTE A FEUILLES DE MELISSE

Melittis melissophyllum L.

Article révisé en Septembre 2019

Mélittes à feuilles de Mélisse
en sous-bois, au Bois Joly
chemin de COULANGES LA VINEUSE à MIGE
(Yonne)

Noms vernaculaires :

Mélitte, Mélisse des bois, Mélissot, Mélisse « puante » ou « bâtarde »

BOTANIQUE

Famille des Lamiacées (Labiées)

Plante herbacée vivace, de 20-50 cm, d’odeur aromatique devenant forte à la dessiccation (par formation de COUMARINE) ; à tige quadrangulaire ; à feuilles opposées, pétiolées, allongées pointues et dentées ressemblant à celles de la MELISSE, et velues.
Les fleurs naissent à l’aisselle des feuilles, solitaires ou souvent groupées par 2, et caractéristiques des labiées : bi-labiées blanches-rosées, la lèvre supérieure dressée, la lèvre inférieure trilobée maculée de pourpre.
4 étamines.

L’odeur de la plante fraiche n’est pas très agréable, d’où le surnom de « Mélisse puante » qui lui a parfois été donnée.

HABITAT

C’est une labiée d’Europe centrale et d’Europe méridionale ; elle croît dans les sous-bois clairs de feuillus, et sur les talus calcaires en lisière de bois .

USAGE MEDICINAL

1) Historique et usages traditionnels 

La plupart des ouvrages de phytothérapie ne la mentionne pas.
Au XIX° siècle, CAZIN nous indique seulement que son odeur citronnée est moins agréable que celle de la Mélisse ; sa saveur est légèrement aromatique et amère. « Cette espèce possède, à un plus faible degré, les mêmes propriétés que la Mélisse officinale ».

D’après H. LECLERC qui recueillit au début du 20° siècle les usages traditionnels des plantes médicinales de nos campagnes, particulièrement pendant la grande guerre de 1914-1918 où la pénurie de médicaments lui fit rechercher maints remèdes naturels, la MELITTE a été utilisée en médecine populaire pour ses propriétés antispasmodiques (comme la MELISSE) et accessoirement diurétiques.

L’abbé Paul-Victor FOURNIER rappelle en 1947 les qualités qui lui sont traditionnellement attribuées : « Dans la médecine populaire, on l’emploie comme apéritive, anti-catarrhale, diurétique, dépurative, antispasmodique, hypnotique, antidiarrhéique et emménagogue, et à l’extérieur, en gargarismes astringents contre les maux de gorge, en lotions et pansements humides sur les plaies ».

une Mélitte aux "Trous Noublés",
à JUSSY (Yonne)

2) Composition & Pharmacologie

L’odeur de la plante fraiche n’est pas très agréable, mais cette labiée, en cours de séchage, développe ensuite une odeur aromatique de foin fraichement coupé caractéristique de la présence de Coumarine. Sa concentration est au taux assez élevé de 14,39 mg/kg de feuilles (MAGGI, 2011, b).
Cette substance, qui donne aussi au MELILOT ses principales propriétés médicinales, stimule la circulation veino-lymphatique. Elle favorise la reprise des liquides interstitiels et des protéines qu’ils contiennent. La rétention des protéines est responsable d’oedème et d’inflammation. Les plantes à Coumarine, comme le MELILOT et la MELITTE, aident à résorber les oedèmes veino-lymphatiques, et à faire régresser les phénomènes inflammatoires.

Parmi plus de 100 composants isolés, deux sont responsables des arômes de la plantes utilisés dans l’industrie alimentaire pour aromatiser les aliments :
 le C(8) alcohol oct-1-en-3-ol d’odeur ressemblant à celle de champignon
 et la dite Coumarine, une substance phénolique, dont l’odeur rappelle celle de la gousse de vanille (MAGGI, 2011, a).

11 acides phénoliques ont été identifiés (SKRZYPCZAK-PIETRASZEK, 2012) :
les acides : protocatéchique, chlorogénique, para-hydroxybenzoïque, vanillique, caféique, syringique, para-coumarique, férulique, sinapique, O-coumarique, cinnamique. Leur taux dans la plante subit des variations selon les saisons.

ainsi que 8 composés flavonoïdes (SKRZYPCZAK-PIETRAZEK, 2014) :
le cinaroside (luteoline 7-O-glucoside)
la rutine
la myricétine
la quercitrine
la quercétine
la lutéoline
le kaempférol
et l’apigénine
Tous ces flavonoïdes sont antioxydants, protecteurs vasculaires...
En particulier, l’Apigénine possède de multiples propriétés : elle a un pouvoir antioxydant puissant, également anti-inflammatoire et anticancéreux, antiviral ; elle a des propriétés sédative, anxiolytique et hypnotique.

La Mélitte à feuilles de Mélisse renferme aussi une Huile Essentielle (HE) en petite quantité (0,13%) dont les principaux composants identifiés sont (KAURINOVIC, 2011) :
Citronellal, Béta-Caryophyllène, Béta-Caryophyllène-oxide, Germacrène D, Nérol, Géranial, Citronellol, Géraniol
Cette HE est spasmolytique, relaxante musculaire, sédative, narcotique, antibactérienne et antifongique.

Par ailleurs, ont été récemment découvertes plusieurs glucosides-iridoïdes, dont certaines étaient déjà connues comme présentes chez d’autres lamiacées (VENDITTI, 2016) : monomellitoside, mellitoside, harpagide, acétyl-harpagide, ajugoside, et allobetonicoside.
Ces iridoïdes sont de petites molécules dérivées des monoterpènes, qui ont des propriétés anti-inflammatoires, de défense antibactérienne, et pour certaines : analgésiques, antispasmodiques, antivirales...

Toute la plante, feuilles et fleurs, possède une activité antioxydante (GRUJIC, 2014) notamment grâce à ses composants phénoliques et ses flavonoïdes. Ceux-ci assurent aussi une hépatoprotection contre les agressions toxiques (dont un modèle expérimental est réalisé en laboratoire sur l’animal par l’intoxication au tétrachlorure de carbone ou CCL4) (KAURINOVIC, 2011).

3) INDICATIONS THERAPEUTIQUES de la MELITTE

On lui reconnaît :
=> des propriétés antispasmodiques et légèrement sédatives : sur les crampes d’estomac, spasmes abdominaux, douleurs prémenstruelles, et les états nerveux-anxieux, avec troubles du sommeil.

=> un effet diurétique et draineur urinaire dans la colibacillose

=> une propriété phlébo-protectrice liée à la COUMARINE qu’elle contient, substance phlébotonique indiquée dans les varices des membres inférieurs, et active sur l’oedème lymphatique ; la COUMARINE elle-même n’est pas anti-coagulante, mais certains dérivés formés à l’occasion de la fermentation de la plante peut mener à des composés anti-coagulants.
Toutefois, il est préférable dans cette indication d’utiliser le MELILOT ou l’ASPERULE ODORANTE, plus riches en composés coumariniques, ; ou bien de les associer.

=> antiphlogistique (décongestionnant local) dans les contusions

=> antiseptique et anti-inflammatoire oculaire (présence d’iridoïdes)

=> emménagogue (favorise la bonne venue des règles)

USAGE CULINAIRE

La Mélitte est comestible ; les jeunes feuilles se mangent en salade.

EMPLOI MEDICINAL et POSOLOGIE

En INFUSION : FOURNIER indique 50 g/ litre d’eau bouillante ; mais on peut augmenter la posologie à 20 g de plantes par tasse x 3 à 4 fois /j. dans la varicose ou le lymphoedème.

 en DECOCTION pour des gargarismes ou en applications externes sur des contusions : 100 g/ litre.

PHARMACOPEE FRANÇAISE 

non-inscrite sur la Liste A (ansm Janvier 2019)

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1) Bibliographie générale

H. LECLERC « Précis de Phytothérapie » p. 220-222

Paul-Victor FOURNIER « Dictionnaire des Plantes médicinales et vénéneuses de France » 1947, ré-éd. 2010, p. 622-623

Bernard BOULARD « Plantes médicinales du monde » p. 346-347 (§ 770)

2) Ouvrages anciens

François Joseph CAZIN « Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes » Paris, 1868, p. 626

3) Articles scientifiques 

(articles classés en ordre chronologique, des plus anciens aux plus récents) :
En langue anglaise, la Mélitte à feuilles de Mélisse est appelée "Bastard Balm".

VELASCO-NEGUERUELA A, SANZ J, PEREZ-ALONSO MJ, PALA-PAUL J. « The volatile components of the aerial parts of Melittis melissophyllum L. subsp. melissophyllum gathered in Spain » Bot. Complutensis 2004 ; 28 : 133-36 (University of Madrid, Spain)

KAURINOVIC B, POPOVIC M, VLAISAVLJIEVIC S, RASETA M. « Antioxidant activities of Melittis melissophyllum L. (Lamiaceae). » Molecules 2011 Apr ; 16(4) : 3152-67 (University of Novi Sad, Serbia)

MAGGI F, MARTONFI P, CONTI F, CRISTALLI G, PAPA F, SAGRATINI G, VITTORI S. « Volatiles components of whole and different plant parts of bastard balm (Melittis melissophyllum L., Lamiaceae) collected in Central Italy and Slovakia » Chem. Biodivers. 2011 Nov ; 8(11) : 2057-79 (University of Camerino, Italy)

MAGGI F, BARBONI L, CAPRIOLI G, PAPA F, RICCIUTELLI M, SAGRATINI G, VITTORI S. « HPLC quantification of coumarin in bastard balm (Melittis melissophyllum L. , Lamiaceae) » Fitoterapia 2011 Dec ; 82(8) : 1215-21 (University of Camerino, Italy)

SKRZYPCZAK-PIETRASZEK E, PIETRASZEK J. « Chemical profile and seasonal variation of phenolic acid content in bastard balm (Melittis melissophyllum L., Lamiaceae) » J. Pharm. Biomed. Anal. 2012 Jul ; 66 : 154-61 (Jagiellonian University, Krakow, Poland)

GRUJIC S, STOJANOVIC G, MITIC V, STANKOV-JOVANOVIC V, DZAMIC A, ALIMPIC A, MARIN P. « Evaluation of antioxidant activity of Melittis melissophyllum L ; extracts » Archives Biol. Sci. 2014 Jan ; 66(4) : 1401-10 (Universities of Belgrade & Nis, Serbia)

SKRZYPCZAK- PIETRASZEK E, PIETRASZEK J. « Seasonal changes of flavonoids content in Melittis melissophyllum L. (Lamiaceae) » Chem. Biodivers. 2014 Apr ; 11(4) : 562-70 (Jagiellonian University, Krakow, Poland)

VENDITTI A, FREZA C, GUARCINI L, MAGGI F, BIANCO A, SERAFINI M. « Reassessment of melittis melissophyllum L. subsp. melissophyllum iridoidic fraction » Nat. Prod. Res. 2016 ; 30(2) : 218-22 (Sapienza-University of Roma, Italy)

WEBOGRAPHIE 

www.fr.wikipedia.org
www.wikiphyto.org
www.complements-alimentaires.co
www.naturalmedicinalherbs.net

Par Dr Dom COQUERET

Le lundi 21 août 2017

Mis à jour le 2 septembre 2019