REINE des PRES
Filipendula ulmaria (L.) Maxim.
ou Spiraea ulmaria L.
Article révisé en Octobre 2019
Noms vernaculaires :
Ulmaire, Spirée ulmaire, Filipendule, Belle des prés, Barbe de chèvre ou Barbe de bouc, …
BOTANIQUE
Famille des Rosacées
Grande plante vivace, née d’une souche rampante et noueuse ; à tige cannelée et dressée, vert-rougeâtre, pouvant atteindre 100 à 150 cm ; à grandes feuilles alternes très découpées, dentées, avec folioles par paires des deux côtés du pétiole, la foliole terminale étant grande et trilobée ; ces feuilles sont vertes au-dessus et argentées à leur face inférieure. Les inflorescences sont nombreuses, groupées en panicules, à petites fleurs blanches ou blanc-crème à 5 pétales, qui fleurissent de Juin à Septembre, en répandant une odeur aromatique. Les fruits torsadés ou « spirés » ont donné le nom à la plante, qui est mellifère.
On peut confondre la Reine des prés avec une autre Filipendule : la Spirée filipendule, ou Filipendule commune (Filipendula vulgaris Moensch) qui est de taille plus petite, dont les racines portes des nodules, aux feuilles plus finement découpées et groupées à la base de la tige ; dont l’inflorescence en panicule blanchâtre porte des fleurs à 6 pétales (une exception chez les Rosacées) ; et dont le fruit n’est pas spiralé.
Ceci dit, la plante qui est du même genre, possède des propriétés médicinales assez proches, dont un effet diurétique dû à la présence également de Salicylés. Son HE est antibactérienne (RADULOVIC, 2007).
HABITAT
Son aire de répartition est eurasiatique, allant de l’Atlantique et de la Mer du Nord à la Sibérie ; plutôt dans les régions septentrionales froides et les régions tempérées. Vivace, elle résiste jusqu’à -20°C.
On ne la trouve pas dans les régions méridionales de la Méditerranée.
Comme la bien-nommée, la « Reine » se plait à pousser dans les fossés qui bordent les prés, dans les lieux humides, sur les berges des rivières, au bord des canaux, près des marais. Elle indique des sols totalement engorgés (hydromorphisme et anaérobiose).
USAGE MEDICINAL
1) Historique et usages traditionnels
L’abbé FOURNIER nous apprend que la Reine des prés n’était pas connue des auteurs grecs antiques, pour la bonne raison qu’elle ne pousse pas dans les régions méditerranéennes.
Du Moyen-Age au XVI° siècle, elle est confondue avec d’autres plantes appelées « Barbe-de-bouc », comme la Barbe-de-bouc sylvestre (Aruncus silvester Kosteletzky), ou la Spirée Filipendule ou Filipendule commune (Filipendula vulgaris) d’autant plus que cette dernière partageait des propriétés semblables.
Au XVIII° siècle, on la prescrivait pour faire faciliter la sortie des maladies éruptives. « GILIBERT vantait la décoction de sa racine contre les fièvres malignes. A la même époque, on recommandait sa décoction vineuse comme astringente contre la diarrhée, la dysenterie et les crachements de sang ; la poudre de racines, contre les hémorroïdes non fluentes ; la décoction aqueuse comme détersive sur les plaies et les ulcères. »
La plante était pratiquement oubliée au XIX° siècle, nous dit François-Joseph CAZIN en 1858 « lorsque M. OBRIOT, curé de Trémilly (Haute-Marne), fit connaître les succès qu’il en avait obtenus dans le traitement des hydropisies (oedèmes). TEISSIER, médecin de l’Hôtel-Dieu , de Lyon, ayant eu connaissance de ces succès, se livra à des expériences qui lui démontrèrent que la Spirée ulmaire jouit de propriétés diurétiques qui en rendent l’emploi fort utile dans les diverses hydropisies ». En administrant une décoction de la plante à la posologie d’un litre par jour, la diurèse reprenait au 3° jour, puis le traitement en une dizaine de semaine venait complètement à bout de l’épanchement.
Une observation intéressante qu’il cite, du Dr GUITARD, rapportée dans la Gazette Médicale de Toulouse en 1853, concerne un patient de 45 ans atteint d’une ascite secondaire à une tumeur du pylore : « Dans les premiers jours qui suivirent la ponction pratiquée pour la seconde fois,... la collection semblait se renouveler plus promptement ; mais après une semaine de l’emploi de cette tisane, il s’établit une abondante diurèse, le ventre s’affaissa peu à peu. On continua l’usage de la Reine des prés...(au 2° mois, le patient) commençait à se lever. L’épanchement séreux ne revint pas. Après six mois, il se portait aussi bien qu’avant sa maladie. Cependant la tumeur pylorique était seulement diminuée, mais non complètement disparue ».
Cette observation est d’autant plus remarquable quand on sait combien les ascites néoplasiques sont réfractaires aux traitements (diurétiques et ponctions) ; elles se reproduisent en général de plus en plus rapidement. En outre, dans le cas décrit, on peut se poser la question si le remède, la Reine des prés, n’a pas en même temps exercé un effet antitumoral, puisqu’au bout de six mois, la tumeur loin d’augmenter est décrite comme ayant plutôt « diminué ».
CAZIN cite encore en faveur de l’efficacité diurétique de la plante un cas personnel : « La décoction d’ulmaire m’a complètement réussi dans un cas d’anasarque (oedème généralisé), suite d’une métrorragie très abondante survenue après l’accouchement, et qui avait amené un état extrême de débilité. La diurèse produite par l’emploi de ce remède fut tellement abondante, que toute apparence d’infiltration disparut dans l’espace de dix jours ».
Quant à Henri LECLERC, phytothérapeute au début du XX° siècle, son expérimentation personnelle lui avait permis « d’apprécier les effets diurétiques de l’Ulmaire : je la considère comme un excellent adjuvant dans le traitement du rhumatisme articulaire aigu où je l’ai vue, en plusieurs cas, déterminer, par une copieuse diurèse, la disparition des épanchements articulaires et viscéraux. C’est également l’opinion du Pr G. PARTURIER qui en fait le meilleur agent thérapeutique de la cellulite, le médicament du tissu conjonctif et de l’adipose, et celle de F. DECAUX qui a souvent prescrit l’infusion dans un certain nombre de manifestations arthritiques et particulièrement chez les sujets rhumatisants dont les urines diminuées de volume laissaient déposer des sédiments uratiques. D’une façon à peu près constante on notait une augmentation de la diurèse avec diminution ou même disparition des sédiments en même temps que le patient accusait une sensible amélioration de son état rhumatismal ».
2) Composition & Pharmacologie
La Reine des prés est une plante précieuse par son contenu et ses propriétés pharmacologiques. Avec les nouveaux procédés d’analyse par chromatographie (liquide ou gazeuse) couplée à la spectrométrie de masse, on est parvenu en 2016 à identifier 119 composés, dont 69 nouveaux ! pour la plupart des composés phénoliques (BIJTTEBIER, 2016).
La plante contient en effet :
— Des composés phénoliques : parmi lesquels :
– Des Salicylés ou Salicylates qui possèdent un noyau benzénique (apparenté au phénol), et existent sous forme de sels ou de glucosides. Leur taux approche les 0,5% (ZEYLSTRA, 1998). Ce sont eux qui rendent compte des propriétés antipyrétique, analgésique, et anti-inflammatoire de la plante.
. Le Salicylate de Méthyle (ou Ester de Méthyle d’acide salicylique) est responsable de l’odeur douce, agréable de la plante qui se situe entre l’amande et la vanille. On le trouve aussi dans la Gaulthérie couchée (Gaultheria procumbens) d’où le nom d’Essence de Wintergreen qui est le nom anglais de la Gaulthérie ; chez les Bétulacées et en particulier chez le Bouleau blanc (Betula alba) duquel on extrait ce salicylate ; on le trouve encore dans les feuilles de Noyer (Juglans regia), la Pyrole (Pyrola), le Cocaïer... C’est une substance de défense que la plante sécrète dès qu’elle est attaquée par des insectes herbivores (comme des chenilles), car elle possède une certaine toxicité (insecticide naturel) ; d’autre part, libérée dans l’air, elle agit comme une exophéromone afin d’attirer les prédateurs insectivores ! Récemment, on s’est aperçu que les feuilles de noyer exhalaient ce Salicylate de Méthyle en cas d’attaque par des insectes, mais aussi en sécrétaient en cas de chaleur excessive du climat. Il en est déduit que cette substance prémunit l’arbre contre la chaleur, tout autant qu’elle est connue comme « fébrifuge » administrée à des animaux ou à l’homme !
. L’acide Salicylique présente dans la Reine des Prés existe aussi en grande quantité dans l’écorce de Saule (Salix alba). Toutefois, les feuilles d’Ulmaire sont la source la plus riche d’acide Salicylique (0,295-0,487%), alors que l’écorce de Saule contient surtout des dérivés d’alcool salicylique (0,199-0,315%) (TOIU, 2011). Cette écorce était déjà utilisée depuis l’Antiquité, chez les Egyptiens et chez HIPPOCRATE, le père de la Médecine grecque au 5° siècle avant notre ère, pour soulager les rhumatisants. Isolé au XIX° siècle sous le nom de « Salicyline », il fut purifié et vendu sous forme de sel de Salicylate de Sodium, mais celui s’avéra vite très ulcérogène. Le chimiste alsacien GERHARDT en 1853 greffa un radical acétyl sur le noyau phénol, réalisant pour la première fois la synthèse de l’Acide acétylsalicylique, une molécule synthétique plus stable. Ce n’est qu’en 1897 que Félix HOFFMANN, un chimiste allemand travaillant pour la firme BAYER en Suisse, reprit les travaux de synthèse de la molécule, qu’il nomma « ASPIRINE », dont le nom dérive de la « Spirée » ulmaire, l’ancien nom de la plante. La commercialisation de l’Aspirine, un peu moins ulcérogène, mais excellent fébrifuge, va en faire le premier antipyrétique, antalgique, et anti-inflammatoire répandu dans le monde entier au XX° siècle.
Ce n’est qu’en 1971 que VANE découvre le mécanisme d’action de l’Aspirine en inhibant les prostaglandines, dont la COX-2 (la Cyclo-oxygénase).
Dans ces mêmes années 1970 et sq. on découvre son action anti-agrégante plaquettaire (par inhibition des thromboxanes), qui va la faire prescrire depuis à large échelle, et à faible dose, comme un excellent préventif de thrombose artérielle. Cette Aspirine, qui avait été détrônée en partie par le Paracétamol et par des anti-inflammatoires non-stéroïdiens (comme l’Ibuprofen), trouve là un « renouveau » dans les maladies cardio-vasculaires : à la posologie de 75 à 100 mg/24H, il prévient les thromboses coronariennes et carotidiennes chez les sujets présentant une artérioclérose (ou athéromatose).
On l’utilise aussi chez les femmes enceintes en cas de signe de pré-éclampsie, dans laquelle des thromboses placentaires conduisent à la toxémie gravidique.
C’est en inhibant les prostaglandines au niveau de l’hypothalamus qui contrôle notre « thermostat » que l’Aspirine fait baisser la fièvre.
Mais, de façon non-spécifique, elle inhibe encore les prostaglandines de l’estomac chargées d’activer la régénération de la muqueuse ; d’où le risque de gastrite érosive et d’ulcère gastro-duodénal.
Une analogie assez remarquable existe entre le monde végétal et le monde animal-humain concernant l’action physiologique de l’acide Salicylique : dans la plante, ce salicylé antagonise une hormone végétale, l’acide Jasmonique qui joue un important rôle régulateur de manière analogue aux prostaglandines humaines !
. La Salicyline est un précurseur, dans la plante, du Salicylate de Méthyle et du Salicylaldéhyde.
. Le Salicylaldéhyde (ou Aldéhyde salicylique) présent dans la Reine des prés, dans l’écorce de Saule et aussi dans le Sarrasin, est un composé benzénique, aromatique, dont l’odeur rappelle également celle de l’amande ; il est très apprécié en cosmétologie.
. La Gaulthérine ou Monotropitoside est un hétéroside (c’est-à-dire une molécule complexe comportant une chaine glucidique) dont l’aglycone est le Salicylate de Méthyle. Plus précisément, il s’agit du Xyloglucoside de Salicylate de Méthyle. Il est anti-inflammatoire. Il n’affecte pas l’estomac, car son Salicylate n’est libéré que dans l’intestin.
. La Spiraéine est un hétéroside phénolique, dérivé des Salicylés précédents.
– Parmi les composés phénoliques, il y a encore des acides phénoliques :
acide gallique, acide protocatéchique, acide caféique, acide ellagique...
– Des Flavonoïdes : qui représentent 4% à 6% des fleurs. Mais chez certains spécimens de Filipendula ulmaria récoltés dans l’Oural dans la région de Sverdlovsk, ce taux de flavonoïdes atteint dans les fleurs 8,3%-12,9% -ce qui est une très haute teneur-, alors que ce taux n’est que de 3,3%-5,5% dans les feuilles (VYSOCHINA, 2013).
Parmi eux, les plus représentatifs sont : Les dérivés de Quercétine et de Kaempférol (AVRAAMOVICH KRASNOV, 2006) et (OLENNIKOV, 2016) :
l’Isoquercitrine (Quercétine-3-O-β-D-glucoside)
l’Avicularine (Quercétine-3-O- α-L-arabinoside)
la Miquelianine (Quercétine-3-O- β-D-glycuronide)
la Quercitine (Quercétine-3-O- α-L-rhamnoside)
le Spiraeoside (Quercétine-4-O- β-D-glucoside) qui est le plus puissant anti-oxydant de la plante.
l’Afzéline (Kaempférol-3-O- α-L-rhamnoside)
et du Kaempférol-4-O- β-D-glucoside.
– Des Catéchines : qui sont des composés phénoliques réactifs, intervenant dans la chaine d’oxydo-réduction.
– Des Tanins : dont la teneur est 2 fois plus importante dans les feuilles que dans les fleurs : ce sont des tanins hydrolysables ou Ellagitanins (monomériques et dimériques) au taux de 55-124 mg/g. qui sont spécifiques au genre Ulmaria, dont :
. le Rugosine D ; puis ont été identifiés les Rugosine A, B, et E (FECKA, 2009)
. et le Tellimagrandin qui est antitumoral, anti-hypertriglycéridémique, et qui potentialise l’action des Antibiotiques bêta-lactamines sur les staphylocoques résistants. .
Les ellagitanins sont connus aussi pour leur propriété anti-hyperglycémique.
— des acides organiques : acide citrique, acide malique, acide oxalique...
— Une Coumarine (trace)
— Des Saponines : qui préviennent l’artériosclérose et l’hypertension ; et ont des propriétés antinéoplasiques.
— des Substances peptiques : Protopectines et Pectines ; qui ont un rôle de désintoxication des métaux lourds et des isotopes radio-actifs.
— des Caroténoïdes , surtout dans les feuilles, qui ont une fonction de type Vitaminique A : des effets endocriniens sur le système de reproduction ; ils sont antimycosiques, et freine la croissance tumorale. Ils protègent la plante contre l’excès d’ensoleillement en absorbant l’énergie (parallèlement à la photosynthèse assurée par la Chlorophylle). Ils sont antioxydants.
La répartition de ces substances actives est différente dans les différentes parties de la plante. En résumé :
Les Fleurs concentrent les Flavonoïdes, les Tanins, et les Saponines ;
Les Feuilles concentrent les Catéchines, les Protopectines, et les Caroténoïdes (VYSOCHINA, 2013).
La Reine des prés renferme encore une Huile Essentielle (HE) en petite quantité (0,05% à 0,2% de la plante séchée) dont l’odeur d’amande caractéristique est due principalement au Salicylate de Méthyle. Les principaux composants volatiles (seulement ceux au taux > 1% dans cette HE de Filipendula ulmaria) sont :
. simples phénols :
Benzaldéhyde 2,3%
Alcool Benzylique 1,4%
Salicylaldéhyde 35,7%
Salicylate de Méthyle 18,4%
Salicylate d’Ethyl 1,1%
Salicylate de Benzyle 6,3%
. Monoterpènes :
Linalool 2,3%
α-Terpinéol 2,2%
. Sesquiterpènes :
β- Caryophyllène 1,6%
Germacrène D 1,2%
β-(E)-Ionone 2,3%
. Composés aliphatiques :
Décanal 1,6%
Pentadécanal 1,9%
Hexadécanal 5,2%
Heptadécanal 6,9%
Les 2 composés volatils principaux de l’HE de F. ulmaria sont donc le Salicylaldéhyde prédominant et le Salicylate de Méthyle.
Par comparaison avec 3 autres espèces de Filipendula poussant dans l’Oural :
Filipendula stepposa : Salicylaldéhyde 25,7%
Salicylate de Méthyle 14,2%
Filipendula denudata : Salicylaldéhyde 45,9%
Salicylate de Méthyle 20,7%
Filipendula camschatica : Salicylaldéhyde 9,0%
Salicylate de Méthyle 73,9%
Notons que chez une espèce proche de Filipendula, la Spirée filipendule (Filipendula vulgaris), le composant principal de l’HE de feuilles est le Salicylaldéhyde 68,6% ce qui fait de cette plante une bonne source de Salicylés (RADULOVIC, 2007).
La plante renferme encore :
– des acides aminés
– de la Vitamine C
– des minéraux : Fer, Soufre, Calcium, Magnésium, Potassium
La Reine des prés est un remède qui présente un fort pouvoir antioxydant. Une analyse plus détaillée de ses composants conduit à montrer que ce sont les Ellagitanins qui supportent principalement cette action de « piégeurs de radicaux libres » : surtout les dérivés des acides gallique et ellagique, et la Rugosine E ; suivis par les flavonoïdes (dont le Spiraeoside) et les acides phénoliques (PUKALSKIENE, 2015).
Expérimentalement, in vitro et in vivo chez l’animal de laboratoire, sur un modèle d’inflammation aiguë de la patte du rat, les extraits des parties aériennes et des racines de la Reine des prés sont anti-inflammatoires à des posologies de 100-200 mg/kg (KATANIC, 2016).
Dans un même modèle d’inflammation aiguë, l’administration orale d’une infusion d’extrait lyophilisé procure un effet anti-hyperalgique dose-dépendant pour des posologies de 100-300mg/kg ; avec une sécurité d’administration, la dose léthale 50% (DL50) étant supérieure à 2000mg/kg (SAMARDZIC, 2016).
La Reine des prés est antibactérienne sur divers types de bactéries Gram + et Gram -, à savoir : Streptococcus pyogenes hemolyticus, Staphylococcus aureus, Escherichia coli, Shigella flexneri, Klebsiella pneumoniae, Bacillus subtilis (CSEDOE, 1993).
Cette activité antibactérienne a été confirmée sur un éventail de germes dont plusieurs responsables d’infections intestinales ou urinaires, où l’extrait aqueux s’avère plus efficace que d’autres solvants testés, sur : Staphylococcus epidermidis, Staphylococcus aureus, Salmonella typhimurium, Serratia marcescens, Pseudomonas aeruginosa, Proteus vulgaris, Klebsiella pneumoniae, et Enterobacter cloacae (BIRINCI YILDIRIM, 2009).
La décoction de fleurs de Reine des prés réduit le risque ulcérogène gastrique chez le rat soumis à des procédures de ligature du pylore, d’injection de Réserpine, ou d’administration de Phénylbutazone (un anti-inflammatoire). Elle prévient aussi l’ulcérogenèse induite par l’acide acétylsalicylique (Aspirine) et par l’Alcool (BARNAULOV, 1980). Cette étude
appelle la remarque que l’Ulmaire est bien un protecteur gastrique comme l’ont affirmé les observations traditionnelles ; mais cela signifie aussi que la plante entière contient des substances qui antidotent les risques dus aux Salicylés qu’elle contient.
Reprenant le même protocole chez le rat, avec les parties aériennes de la Reine des prés (fleurs, feuilles, et tiges) administrées en infusion, une autre étude a confirmé l’ulcéroprotection gastrique de la plante (GORBACHEVA, 2002).
Les différentes parties de la Reine des Prés (racines, feuilles, fleurs) ont un effet immunomodulateur. Mais l’extrait de fleurs possède une forte capacité d’inhiber la voie classique d’activation du complément. Celle-ci contrôle l’activation leucocytaire, la phagocytose, la formation des immuns complexes antigènes-anticorps...mais intervient aussi dans certaines inflammations. L’inhibition de cette voie du complément pourrait expliquer l’action anti-inflammatoire reconnue de la Reine des prés (HALKES, 1997 a et b).
La Reine des prés est hépatoprotectrice. Dans un modèle d’hépatite toxique chez le rat par du CCL4 (Tétrachlorure de carbone) pendant 6 jours, l’administration pendant les 5 jours suivants d’extrait de Filipendula ulmaria (dont le taux de Flavonoïdes est de 4,3%) à la dose de 100mg/kg ramène les enzymes hépatiques à la normale, ainsi que le système de défense de la Superoxyde Dismutase (SOD). Le rôle hépatoprotecteur de la Reine des prés est assuré principalement par la fraction phénolique de la plante, responsable des effets antioxydants et stabilisants membranaires. L’efficacité est comparable à la Silymarine et même légèrement supérieure (SHILOVA, 2008).
In vivo chez le rat, l’extrait de Reine des prés, par son action sur le « stress oxydatif », réduit les effets toxiques sur le foie et les reins du Cisplatine (un antinéoplasique très utilisé en chimiothérapie anticancéreuse). Son administration simultanée au Cisplatine peut donc en atténuer les effets secondaires (KATANIC, 2017).
Nous n’avons malheureusement trouvé aucune étude clinique humaine réalisée avec la Reine des prés dans les rhumatismes.
La seule étude clinique a été menée en Russie chez 48 femmes présentant une dysplasie précancéreuse du col utérin ; traitées par des applications cervicales d’un onguent à base de fleurs de Reine des prés. 32 (soit 67%) ont eu une réponse positive au traitement, dont 25 (52%) une rémission complète des lésions ; chez qui 10 n’ont eu aucune récidive locale dans les 12 mois suivants. Cela confère à la plante un rôle antidysplasique (antitumoral) sur des lésions précancéreuses du col utérin (PERESUN’KO, 1993).
3) INDICATIONS THERAPEUTIQUES de la REINE des PRES
Les données résultant des observations empiriques collectées par la Médecine traditionnelle, couplées aux travaux pharmacologiques, permettent de retenir comme indications thérapeutiques :
=> un effet diurétique notable qui élimine l’excès d’acide urique et les chlorures des oedèmes ; indiquée dans les oedèmes, la Reine des prés mérite même d’être essayée dans des oedèmes généralisés (anasarque) ou « bloqués » comme c’est le cas de l’ascite. Elle pourrait même réduire les oedèmes articulaires (hydarthrose) des rhumatismes.
La plante a des vertus « dépuratives » dans les maladies de surcharge, goutte et « rétention d’eau » des obésités cellulitiques, surtout lorsqu’il existe un « terrain hydrogénoïde » où les Homéopathes ont observé l’action généralement bénéfique des plantes poussant en terrain humide.
=> un effet anti-inflammatoire notoire et analgésique (grâce aux Salicylés qu’elle contient, bien qu’en taux faible, mais potentialisés par d’autres composés phénoliques) l’indique notamment dans le rhumatisme articulaire aigu, les crises de goutte, l’arthritisme liée à l’acide urique élevé, les poussées d’arthrites et d’arthrose.
=> Elle est aussi fébrifuge et sudorifique, rendant d’immenses services dans les états grippaux et diverses affections fébriles, apportant un précieux soulagement.
=> Elle soulage les gastrites et inflammations du tube digestif. (contrairement à l’acide salicylique et à l’Aspirine, qui sont ulcérogènes sur l’estomac, les précurseurs salicylés comme la Gaulthérine et le Salicylate de Méthyle n’ont pas d’effet délétère sur l’estomac. En outre, les effets potentiels de l’acide Salicylique contenu à un taux faible dans la plante (moins de 0,5%) sont contrecarrés par d’autres composés phénoliques flavonoïdes et des tanins qui sont protecteurs de la muqueuse gastrique. Comme quoi, l’usage de la plante entière a bien plus d’avantage que l’administration isolée d’un Salicylé pur dans les indications de la plante).
Elle est hépatoprotectrice (contre des substances toxiques).
=> Elle a des effets antibactériens qu’on peut mettre à profit comme vulnéraire, dans le lavage des plaies et des ulcères des membres inférieurs.
=> Elle possède quelques propriétés astringentes, par ses tanins, sur les diarrhées.
=> Elle est immunomodulatrice, inhibitrice de l’activation du complément qui favorise la défense immunitaire mais aussi des états inflammatoires. Son intérêt pour freiner les maladies auto-immunes serait à étudier.
=> Enfin, plusieurs composés phénoliques qu’elle contient ont des propriétés antitumorales, ce qui pourrait expliquer l’observation citée dans le § historique où une amélioration avait été obtenue dans une ascite néoplasique. Une étude montre que son application locale est antidysplasique sur les lésions précancéreuses du col utérin. Par ailleurs, la Reine des prés réduit la toxicité hépatique et rénale du Cisplatine ; or, cet antimitotique est très prescrit dans les poly-chimiothérapies qui l’utilisent (dans les cancers de l’ovaire et du testicule, du col cervical et de l’endomètre, de l’oesophage..). Il faudrait des recherches spécifiques pour pouvoir la recommander avec certitude, en association, dans des indications précises en cancérologie.
USAGE CULINAIRE
Les fleurs au parfum aromatique ont été utilisées pour parfumer la bière,
ou le vin auquel elles donnent un goût de muscat : dans 1 litre de vin blanc, laisser macérer pendant 8 jours 30-50 g de sommités fleuries, filtrer, sucrer éventuellement avec du miel pour obtenir un apéritif doux.
A cause de sa saveur qui rappelle aussi l’amande ou la vanille, on l’utilise pour aromatiser des crèmes, des entremets (comme on le fait avec les Fleurs de SUREAU)...
AUTRE USAGE : Usage tinctorial
Les fleurs ont servi à teindre la laine en jaune
RECOLTE
toute la plante, mais surtout les sommités fleuries de préférence fraîches (le séchage fait perdre une partie des propriétés) ; les feuilles aussi sont médicinales.
EMPLOI MEDICINAL et POSOLOGIE
– En INFUSION : seulement dans eau frémissante à 90° :
1 cuillère-à-soupe de fleurs fraiches (ou à défaut de fleurs séchées) par tasse (LIEUTAGHI) x 3-4 fois par jour, dans toutes les indications de la plantes (rhumatismales, digestives, oedémateuses, diurétiques)
– en DECOCTION de feuilles (50 g à 100g par litre, soit à 5% à 10%) pour le lavage des plaies
– en ALCOOLATURE : faire macérer les fleurs dans leur poids d’alcool à 40° pendant une nuit, filtrer ; 1-2 cuillère-à-café par jour
– TEINTURE MERE : SPIRAEA ULMARIA TM : 30 à 50 gouttes (soit 1,5 à 2,5ml) x 3 fois par jour ; la posologie peut être poussée jusqu’à 6-12ml/j. en 3 prises quotidiennes de 4 ml (EMA, 2011) par cures de plusieurs semaines pour un drainage rénal, l’évacuation des oedèmes, ou les poussées rhumatismales. La TM peut aussi facilement être utilisée pour désinfecter les plaies.
– en GELULES de poudre de plante, dont la posologie quotidienne recommandée est de 1000-1500mg/24H (EMA,2011). On trouve en Herboristerie ou en Pharmacie des Gélules à 250mg ou 300mg ; selon le dosage, la posologie sera de 2 gélules x 2 à 3 fois/j.
Associations judicieuses :
On aura tout intérêt à associer la REINE des PRES avec de l’HARPAGOPHYTUM, une plante africaine anti-inflammatoire naturelle et antirhumatismale ; à alterner par cures avec l’ECORCE de SAULE (Salix alba cortex) associé au CASSIS (Ribes nigrum) en TM ou en gélules, auxquels on peut toujours compléter par des applications d’Huile Essentielle de GAULTHERIE (toujours à diluer dans une Huile de massage comme du Jojoba, du Sésame ou du Macadamia)
Dans l’indication diurétique : associer ou alterner avec le SOLIDAGE (Solidago virga aurea).
Contrindications :
– Sensibilisation connue à l’Aspirine ; risque de réaction allergique ou d’asthme
– patient sous anticoagulant
– compétitions sportives (les précurseurs d’acide Salicylique contenus dans la plante peuvent positiver des tests de contrôle, notamment aux USA où les Salicylés sont interdits chez les sportifs)
PHARMACOPEE FRANCAISE
Liste A (ansm Janvier 2017)
REFERENCES BIBLIOGRAPHIEQUES
1) Bibliographie générale
H. LECLERC « Précis de Phytothérapie » p. 55-56
Pierre LIEUTAGHI « Le livre des bonnes herbes » p. 379-381
Pr J-P CHAUMONT, Dr J-M MOREL « Se soigner avec les plantes de Bourgogne » p. 202-203
Francis DEBAISIEUX, J-M POLESE « Plantes médicinales » p. 97
Loïc GIRRE « Les Plantes et les médicaments » p. 39-40
Gérard DUCERF « L’encyclopédie des Plantes bio-indicatrices » Vol 1, p.170
Fabrice BARDEAU « La pharmacie du Bon Dieu » p. 231-233
A-M BOTTICELLI « Les Plantes médicinales » p. 53, 62, 63, 109 Clotilde BOISVERT « Plantes et remèdes naturels » p. 447-448
2) Ouvrages anciens
François-Joseph CAZIN « Traité pratique et raisonné des Plantes Médicinales indigènes » 2° éd. 1858, p. 809-811
Paul-Victor FOURNIER « Dictionnaire des Plantes Médicinales et vénéneuses de France » 1947, ré-éd 2010, p. 403-405
3) Articles scientifiques
(classés en ordre chronologique des plus anciens aux plus récents)
En littérature scientifique anglaise, la Reine des Prés s’appelle « MEADOWSWEET ».
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WEBOGRAPHIE
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https://fr.wikipedia.org/wiki/Filipendula_ulmaria
http://www.wikiphyto.org/wiki/Reine_des_prés
http://www.wikiphyto.org/wiki/Spiraéoside
http://www.wikiphyto.org/wiki/Salicylate_de_méthyle
https://fr.wikipedia.org/wiki/Acide_acétylsalicylique
https://jardinage.lemonde.fr/dossier-1255-bienfaits-atouts-sante-reine-pres.html
http://floranet.pagesperso-orange.fr/med/filiulm.htm
https://www.rebelle-sante.com/belle-sante-ndeg-127/remedes-nature/reine-des-pres-spiraea-ulmaria