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EPILOBE en EPI

EPILOBE en EPI

Epilobium angustifolium L.

ou Epilobium angustifolium (L.) Holub.

ou Epilobium angustifolium (L.) Scop.

EPILOBE à PETITES FLEURS

Epilobium parviflorum Schreb.

Article révisé en Août 2019

une station d’Epilobes en épi dans une clairière,
PONT de MONTVERT (Lozère, 48)

Noms vernaculaires :

Épilobe à feuilles étroites, Laurier de Saint Antoine

BOTANIQUE

Famille des Oenothéracées (ou Onagracées)

l’Épilobe en épi ou à feuilles étroites :
Plante pérenne, qui nait d’un rhizome rampant, d’où s’élève une tige dressée jusqu’à 1,60m à 2m. Les feuilles sont alternes, étroites et lancéolées, et s’étagent tout au long de la tige. Son port et ses feuilles rappellent un peu le Laurier rose. La partie supérieure de la tige porte un épi de fleurs pourpres ou rosées, à 4 sépales roses, 4 pétales en croix , et 8 étamines. Le fruit est une « gousse » ou silique à 4 valves qui, à son ouverture, libère 300 à 400 graines porteuses d’aigrettes courtes que le vent disséminera facilement. Au fur et à mesure que les inflorescences fleurissent vers le haut, les siliques allongées se remarquent à la partie médiane puis supérieure de la plante. Leur totalité peut libérer plus de 60.000 graines, d’où une colonisation rapide possible de la plante dans des endroits humides favorables.

L’Epilobe à petites fleurs (Epilobium parviflorum Schreb.)
Elle est de plus petite taille, environ 80 cm, munie de poils fins ; ses fleurs rosées sont plus petites. Elle serait l’Epilobe la plus active.

Autres variétés proches :
L’Épilobe Hérissée (Epilobium hirsutum L.) ou Épilobe hirsute ou encore Épilobe à grandes fleurs.
Son port ressemble de près à l’Epilobe en épi, atteignant juqu’à 2 mètres, mais ses feuilles sont opposées ; et sa tige ainsi que ses feuilles sont recouvertes de poils.
L’Épilobe à feuilles de Romarin (Epilobium dodonaei Vill.)
Ses feuilles sont petites, très étroites, presqu’en aiguilles comme celles du Romarin ; avec des fleurs très ressemblantes rose-pourpre en croix.
L’Épilobe des montagnes (Epilobium montanum L.)
Il a des feuilles ovales plus courtes ; et des fleurs plus petites.
L’épilobe tétragone (Epilobium tetragonum L.),
ainsi appelée parce que des saillies linéaires rendent la tige tétragone.
L’Épilobe rosé (Epilobium roseum Schreb.)
Il a des feuilles opposées, ovales-lancéolées ; ses fleurs sont rose-pâle.
L’Épilobe foncé (Epilobium obscursum Schreb.)
Ses feuilles, arrondies à la base, sont légèrement dentées.
L’Épilobe des marais (Epilobium palustre L.)
Ces différentes variétés sont souvent difficiles à différentier ; elles sont considérées comme également thérapeutiques.

L’étymologie du nom « épilobe » vient du grec « épi » dessus, et « lobion » la petite gousse parce que la fleur est épanouie au-dessus d’un ovaire infère qui, une fois fécondé, va grossir et s’allonger jusqu’à devenir un silique.
Ses épilobes très voisines sont dites traditionnellement posséder des propriétés semblables ou très voisines.

HABITAT

L’Épilobe en épi est répandu dans tout l’hémisphère Nord, en Amérique du Nord, et en Europe tempérée jusque dans les régions boréales (Scandinavie) et de la Sibérie à l’Asie. Par contre, il n’existe pas en Afrique.
L’Épilobe en épi aime pousse en terrain sableux siliceux, dans des terrains défrichés et ouverts comme des clairières humides ou sur des pentes montagneuses (jusqu’à 2000 m. d’altitude) ; c’est une plante pionnière qui colonise les coupes de bois, là où il y a eu des places à feu. Elle aime les sols humides en fond de vallées, aux abords des cours d’eau et des étangs.

Epilobe en épi au bord du Lac de Charpal en Margeride,
RIEUTORT de RANDON (Lozère, 48)

Les autres Épilobes ont également leurs biotopes dans l’hémisphère Nord :
L’Épilobe à petites fleurs se rencontre de L’Europe à l’Asie, notamment dans les Alpes en altitude moyenne.
L’Épilobe Hirsute se rencontre davantage en sols argilo-calcaires, en lisière de bois, sur les berges de fossés humides.
L’Épilobe à feuilles de Romarin pousse carrément sur les alluvions des berges des rivières, et les bancs de sables des lits de rivières asséchées l’été.
L’Épilobe palustre pousse dans les marais.
L’Épilobe foncé se rencontre plutôt dans les tourbières...

USAGE MEDICINAL

1) Historique et usages traditionnels

Les épilobes semblent ne pas avoir fait partie des médecines gréco-romaines, ni de la médecine arabe. Il est vrai que la plante est rare sur le pourtour méditerranéen. Il n’en n’est pas fait mention dans les textes du Moyen-Age.

Toutefois la tradition populaire y a eu recours comme astringent dans les diarrhées. Bien que les phytothérapeutes CAZIN et LECLERC n’en parlent pas, l’abbé FOURNIER mentionne seulement en 1947 : « Ce sont des plantes astringentes, émollientes, résolutives et mucilagineuses. On a employé surtout les racines de la première (Épilobe en épi) dans la vieille pharmacopée. On recourt encore à elle et aux autres espèces, sous forme de gargarismes et de bains de bouche contre les aphtes ».

La première mention dans un « ouvrage savant » semble être la courte indication faite par Nicholas CULPEPER, un botaniste et physicien anglais du XVII° siècle dans son « The English Physician » de 1652, ré-intitulé « Complete Herbal » en 1653 : sous le nom de Great flowered Willow-Herb, l’Epilobe en épi, il écrit : « Toutes les espèces de Willow-herb (Epilobe) ont les mêmes vertus ; elles sont rafraîchissantes et astringentes. La racine soigneusement séchée et réduite en poudre, est bonne contre les flux de sang, et autres hémorragies » (trad. perso).

Nicolas LEMERY, chimiste et apothicaire à Paris sous Louis XIV, dans son « Traité universel des Drogues Simples » de 1723, nomme la grande Epilobe (en épi) : Chamaenerion epilobium et « Antoniana » (Sancti Antonii herba maxima) c’est-à-dire la « grande herbe de Saint Antoine ». Il écrit brièvement à son sujet : « Ses feuilles sont vulnéraires, détersives et agglutinantes ». Il faut en déduire que ses feuilles étaient utilisées pour des infections cutanées.

Dans l’hémisphère Nord, les Amérindiens utilisaient le « Fireweed » (l’Epilobe à feuilles étroites) comme une grande plante médicinale pour les brûlures urinaires, les difficultés mictionnelles masculines, les toux et le mal de gorge, les gastralgies et les troubles intestinaux, les hémorragies digestives, la tuberculose, et comme une panacée dans les douleurs (MOERMAN, cité par ABASCAL & YARNELL in : PIZZORNO & MURRAY)
Les Tribus Eskimo et les peuples Sibériens traitaient leurs plaies avec des Epilobes.
L’Ecole de « Médecine Eclectique » américaine y a même eu recours dans les diarrhées sévères, comme le choléra infantile et la dysenterie au décours de la typhoïde.

C’est une Herboriste autrichienne Maria TREBEN qui pour la première fois dans les années 1970 révéla en Europe les vertus urinaires et prostatiques de la plante dans son livre « La Santé à la Pharmacie du Bon Dieu ». Elle raconte son histoire : « J’étais une jeune femme lorsque mon beau-père mourut, dans la force de l’âge, d’un agrandissement maladif de la prostate, c’est-à-dire d’une hypertrophie de la prostate ; un voisin qui s’y connaissait en simples me montra l’épilobe à petites fleurs et me dit que si mon beau-père avait bu une tisane préparée à l’aide de cette plante, il serait encore en vie ». Comme beaucoup de villageois dans cette région du Tyrol qui connaissaient l’emploi populaire des plantes médicinales, sa mère allait aussi cueillir diverses plantes, dont cette fameuse épilobe : « Elle la cueillit tous les ans et vint en aide à beaucoup de personnes souffrant des maladies des reins et de la vessie. Ses propriétés thérapeutiques sont si grandes qu’il élimine parfois tous les maux en cas de maladies de la prostate. Il y a des cas où, chez des hommes qui allaient être opérés, ne pouvant plus uriner que par gouttes, une seule tasse de tisane apporta déjà un soulagement ».
« Ma mère attira mon attention sur l’histoire d’un homme qui avait déjà subi trois opérations du cancer de la vessie, un cancer de la vessie que l’on avait reconnu au cours d’examens cliniques ; cet homme se trouvait dans un état physique déplorable. Je lui conseillais de boire de la tisane d’épilobe. C’est son médecin qui m’apprit plus tard sa guérison. »
Elle cite encore plusieurs observations personnelles : « J’ai pu aider un prêtre que les médecins avaient abandonné en raison de son cancer de la prostate et de la vessie et qui peut aujourd’hui se consacrer de nouveau de toutes ses forces à son sacerdoce ».
« Bien des personnes souffrant d’une maladie de la prostate peuvent retrouver leur santé grâce à l’épilobe à petites fleurs, souvent même sans devoir subir une opération. S’il y a eu opération, la tisane d’épilobe à petites fleurs élimine les brûlures et les autres troubles qui sont souvent consécutifs à la maladie ».
Maria TREBEN recommandait de cueillir « la plante tout entière », et d’employer la plante fraîchement cueillie à la bonne posologie de seulement deux tasses par jour (une le matin au réveil, et une autre le soir) ... et étonnamment, de ne pas avoir recours aux Épilobes à feuilles étroites ni aux Épilobes hirsutes qui pouvaient donner « un effet contraire ».

Ceci est d’autant plus surprenant car, si les travaux d’un laboratoire français menés dans les années 1990 ont bien démontré qu’Epilobium parviflorum inhibait la 5-alpha-réductase, enzyme clé de l’hormonodépendance du tissu prostatique et de l’adénocarcinome prostatique (LESUISSE, 1996), les travaux ultérieurs d’une équipe de chercheurs polonais de l’Université de Varsovie découvraient bien les substances actives inhibant la prolifération cellulaire prostatique chez trois espèces d’Épilobe : E. à petites fleurs, mais aussi E. à feuilles étroites, et E. hirsute (STOLARCZYK, 2013) (PIWOWARSKI, 2014)... (voir dans le § Pharmacologie).

un Epilobe hirsute au Lac de SAINT POINT,
MALBUISSON (Doubs, 25)

2) Composition & Pharmacologie

Les Épilobes sont des plantes dont la composition chimiques est particulièrement riche en polyphénols : tanins, flavonoïdes, et acides phénoliques. Le dosage des composés phénoliques d’Epilobium angustifolium atteint 26,95 gGAE/100g en poids sec, ce qui est une haute teneur (OSTROVSKA, 2017).

— Les Tanins représentent la majeure partie de ces polyphénols ; et parmi eux, les Ellagitanins dont on connait les propriétés astringentes et anti-inflammatoires. Parmi eux, les deux plus importants isolés dans les années 1990 sont l’Oenothéine A et B . Leur structure chimique a fini par être élucidée ; en particulier, l’Oenothéine B a une structure dimérique macrocyclique qui résulte de la condensation de 2 molécules de Tellimagrandin (YOSHIDA, 2018). Elle a tout de suite attirée l’attention des chercheurs par ses propriétés intéressantes : anti-inflammatoire et inhibitrice de la croissance de l’adénome prostatique. Elle est présente chez plusieurs Epilobes (E. parviflorum, angustifolium...) où son taux atteint 20% à 35% des tanins , mais aussi chez la Salicaire (Lythrum salicaria), elle aussi une plante aux ’feuilles de saule’ poussant au bord des rivières ! D’autres Oenotéines (C, F, K) ont été identifiées avec des structures complexes tri-, quadri-, penta-, hepta-mériques macrocycliques... dans la famille des Oenothéracées, mais aussi des Lythracées et des Myrtacées.

— des Flavonoïdes : Myricétine, Quercétine, Kaempférol, et leurs dérivés glucosidiques comme :
l’Afzéline (Kaempférol-3-O-rhamnoside)
la Juglaline (Kaempférol-3-O-arabinofuranoside)
l’Avicularine (Quercétine-3-O- α -arabinofuranoside)
l’Hyperoside (Quercétine-3-O-galactoside)
l’Isoquercétine (Quercétine-3-O-glucoside)
la Quercitrine (Quercétine-3-O-rhamnoside)
et la Miquelianine (Quercétine-3-O-glucuronide) qui est le principal flavonoïde d’Epilobe angustifolium ;
alors que la Myricétine (Myricétine-3-O-rhamnoside) est le principal flavonoïde des autres espèces d’Epilobes (PRASAD, 2018).
Tous ceux-ci sont de bons anti-oxydants.
L’espèce qui a montré la capacité anti-oxydante la plus puissante était l’Epilobe à petites fleurs (parviflorum) (HEVESI, 2009).

— dans les graines (de E. tetragonum et E. hirsutum) : 6 Acides Gras : acide palmitique, stéarique, oléique, linoléique, γ-linolénique, α-linolénique (PELC, 2005)
— des Stérols comme le β-Sitostérol et le Brassicastérol
— des mucilages
— de la Vitamine C

Suite aux usages traditionnels (dans les diarrhées, les inflammations intestinales, et les pathologies urinaires...), les recherches pharmacologiques sur plusieurs espèces d’Épilobes ont validé leurs propriétés : anti-oxydante, antimicrobienne, anti-inflammatoire, anti-proliférative, et analgésique ; qui les font indiquer dans les inflammations gastro-intestinales et l’hypertrophie prostatique (GRANICA, 2014).

Les fleurs et feuilles de l’Épilobe à feuilles étroites ont une action antimicrobienne égale sur des bactéries Gram + (Staphylococcus aureus et Bacillus subtilis) et des bacilles Gram - (Escherichia coli, Proteus mirabilis, Pseudomonas aeruginosa) avec des CMI (concentrations minimales inhibitrices) entre 6 et 9 mg/ml (sauf 16mg/ml pour le Proteus mirabilis) ; ainsi qu’une très bonne activité antimycosique sur le Candida albicans (sur lequel l’Epilobe provoque l’apoptose) (KOSALEC, 2013).

Par ses flavonoïdes, les Épilobes ont des propriétés anti-inflammatoires. Tout particulièrement, la Myricétine méthyl glucuronate est inhibiteur de prostaglandines (COX1, COX2, et 5-LOX), et manifeste un effet anti-inflammatoire dans le modèle expérimental d’oedème induit chez le lapin. Par ailleurs, son administration chez le rat n’a pas montré de survenue d’ulcère gastrique (HIERMANN, 1998).
Les extraits d’Epilobes contenant de l’Oenothéine B sont de puissants inhibiteurs enzymatiques, notamment de la hyaluronidase, de la lipo-oxygénase, et de la myéloperoxydase libérée par les neutrophiles, ce qui lui confère une action anti-inflammatoire similaire à certains anti-inflammatoires de référence comme l’Indométhacine (KISS, 2011).

Les Ellagitanins ont acquis une grande importance en Phytothérapie.
Par exemple la Géraniine trouvée chez les Géraniums, comme l’Herbe à Robert (Geranium robertianum), ou la Punicalagine isolée du fruit de la Grenade ou Pomegranate (Punica granatum L.). Chez les Épilobes,
l’Oenothéine B a été identifiée comme la substance active inhibitrice de l’enzyme 5-alpha-réductase impliquée dans la croissance adénomateuse prostatique (LESUISSE, 1996).

Dans le domaine de la cancérologie :
Les Polyphénols d’Epilobium angustifolium ont un effet cytotoxique et génotoxique, in vitro, à des concentrations de 75 à 200 μ/ml sur des cellules cancéreuses en culture d’hépatome (HepG2). Il se produit en 24H une inhibition de croissance de ces cellules ; et dès 4H d’incubation, est observée une apoptose (mort cellulaire) résultant d’une fragmentation de l’ADN (OSTROVSKA, 2017).
Les 3 Epilobes (E. angustifolium, E. hirsutum, et E. parviflorum) ont un effet in vitro inhibiteur de la prolifération cellulaire du cancer de la prostate, avec une IC50 à 35 μg/ml. Ils abaissent le taux de PSA de 325ng/ml à 90 ng/ml, et l’activité de l’arginase. Les substances identifiées actives sur cet effet sont l’Oenothéine B, la Quercétine-3-O-Glycuronide, et la Myrcétine-3-O-rhamnoside. Mais c’est l’Oenothéine B qui s’est avérée la plus inhibitrice de la croissance tumorale (avec une IC50 à 7,8 μM). Par ailleurs, les ellagitanins d’Epilobium hirsutum sont transformés par le microbiote intestinal humain en Urolithines, dont l’Urolithine C qui réduit le plus fortement la prolifération cellulaire, le PSA, et l’activité de l’Arginase (STOLARCZYK, 2013, b).
Les recherches in vitro ont montré encore que l’action antitumorale de ces 3 Épilobes (angustifolia, hirsutum, et parviflorum) passe par un mécanisme d’activation (ou de restauration) de l’apoptose, c’est-à-dire de la mort cellulaire) des cellules cancéreuses, en relation avec une augmentation de l’activité de la capsase 3 au niveau mitochondrial. Encore une fois, la substance principale soutenant cette propriété est l’Oenothéine B (STOLARCZYK, 2013, a). Elle a été testée in vivo chez la souris, en injections intrapéritonéales, sur des tumeurs ascitiques des rongeurs ; l’effet positif résulterait d’une stimulation des défenses immunitaires de l’hôte, et une activation macrophagique (MIYAMOTO, 1993).
Les Polyphénols d’Épilobe angustifolium ont donc été jugés comme prometteurs sur le plan thérapeutique (SCHEPETKIN, 2016).
Très récemment, l’expérimentation a été menée in vivo chez le rat sur qui a été greffé un cancer prostatique (lignée cellulaire LNCaP) : l’administration orale d’extrait aqueux d’Épilobe angustifolium aux posologies entre 50 et 200mg/kg réduit le volume tumoral prostatique jusqu’à 13%. L’Oenothéine n’étant pas retrouvée dans l’urine, il faut en déduire qu’un de ses métabolites est actif sur la tumeur. Chez le rat, seule la Nasutine est retrouvée dans l’urine, c’est un métabolite de dégradation des ellagitanins par le microbiote intestinal. Les métabolites issus de cette dégradation varient selon les espèces... chez l’homme supplémenté avec du « Thé d’Épilobe », seule de l’Urolithine est retrouvée au niveau urinaire. Est-ce elle qui est antitumorale ? (PIWOWARSKI, 2017).
Une fois reconnue la propriété antitumorale de ces Ellagitanins d’Epilobes sur l’adénocarcinome prostatique hormonodépendant, les chercheurs en concluent qu’il est temps de passer à des expérimentations cliniques... (VITALONE, 2018).

Les Épilobes possèdent un fort pouvoir analgésique :
 Celui-ci a été recherché sur 2 modèles expérimentaux animaux chez le rat (de la sensibilité thermique par la plaque chaude, et chimique par le « writhing test » induit par l’acide acétique). Chez l’animal prémédiqué par une TM d’Epilobe angustiflolium à la posologie de 380mg/kg, le premier test donne une antalgie légèrement inférieure à celle obtenue par la Morphine (à 10mg/kg en sc). Et le deuxième test (considéré comme plus sensible pour évaluer l’analgésie aux anti-inflammatoires non-stéroidiens) donne un résultat significatif à partir d’une posologie de 95mg/kg ; mais pour une dose supérieure ou égale à 190mg/kg, l’action analgésique égale 300mg/kg d’acétylsalicylate de lysine.
Pour apprécier la marge thérapeutique, en toxicologie : la dose létale pour obtenir 50% de décès dans la population étudiée ou DL50 pour E. angustifolium était de 1,4g/kg. (TITA, 2001).
 La même évaluation a été refaite expérimentalement dans une autre étude, avec les 2 mêmes tests, mais avec un extrait méthanolique des parties aériennes d’Épilobe hirsutum, confirmant une forte activité antalgique, dose-dépendante. A la dose de 500mg/kg, était obtenue une inhibition de la douleur de 97,7%, supérieure à celle produite par du Diclofenac à 50mg/kg (77,8%) et obtenue par la Morphine à 5mg/kg (91,2%). L’obtention d’une analgésie équivalente à celle produite par la Morphine à 5mg/kg est obtenue par une dose de 200mg/kg d’extrait de cette Épilobe.
La recherche toxicologique de la DL50 pour E. hirsutum était de 1,5mg/kg (POURMORAD, 2007).

Les Épilobes, traditionnellement reconnus comme « astringents », sont effectivement anti-diarrhéiques. Des extraits éthanoliques de parties aériennes utilisées fraiches de plusieurs variétés d’Épilobes ont été expérimentés sur des souris chez qui des diarrhées sont induites par l’Huile de Ricin. Cette huile toxique est purgative, et déclenche une irritation intestinale avec hyper-péristaltisme et hypersécrétion de liquide par la muqueuse. L’administration d’Épilobe remédie à la diarrhée, réduit la mobilité intestinale et la sécrétion liquidienne ; ce qui en fait un bon remède d’entérocolite (VITALI, 2006).

Enfin, l’Épilobe à feuilles étroites est immunostimulante : elle active, in vitro et in vivo, le recrutement des monocytes et des macrophages, et les fonctions macrophagiques de défense. Cette propriété immunitaire est supportée en grande partie par l’Ellagitanin Oenothéine B dont la structure doit être intacte pour manifester son action (SCHEPETKIN, 2009).

un Epilobe à feuilles de Romarin au bord du Tarn,
St CHELY du TARN (Lozère, 48)

3) INDICATIONS THERAPEUTIQUES de l’EPILOBE

A partir des données traditionnelles et des propriétés pharmacologiquement validées, il est possible de recommander l’Epilobe pour les indications suivantes (GRANICA, 2014) et (PRASAD, 2018) :

=> L’Épilobe est vulnéraire. Par ses effets antibactérien, anti-inflammatoire et cicatrisant, il guérit en applications externes les infections cutanées, plaies, dermites inflammatoires, brûlures  ; et, au niveau des muqueuses, les aphtes buccales en bains de bouche.

=> L’Épilobe est un analgésique doublé de propriété anti-inflammatoire, ce qui fait qu’il mérite d’être employé dans diverses algies, y compris dans des algies survenant en contexte de maladies cancéreuses. « Les feuilles ont un effet calmant sur le système nerveux ; leur décoction, voire leur infusion, sont employées contres les maux de tête ou la migraine. Elles procurent un sommeil tranquille et bénéfique » (VOLAK & STODOLA, 1983).

=> La plus grande indication des Épilobes est l’Hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) où ils bloquent l’augmentation de volume de la prostate qui est hormonodépendante, en inhibant la 5-alpha-réductase, une enzyme-clé de formation de la dihydrotestostérone, l’hormone masculine favorisant l’évolution adénomateuse de la glande.
L’Épilobe peut réduire également les conséquences mictionnelles de cette HBP : pollakiurie (mictions fréquentes) et dysurie (difficulté d’uriner).
D’après certaines études, il diminue le taux de PSA qui, dans l’HBP, est proportionnel au volume de l’adénome. Bien sûr, comme ce taux de PSA augmente aussi, mais cette fois fortement, en cas de cancer de la prostate, toute augmentation rapide de ce taux devra faire réaliser les biopsies nécessaires à l’affirmation du diagnostic et au traitement adapté.

Il y a des arguments scientifiques en faveur d’une action anticancéreuse des Épilobes, sur plusieurs lignées cellulaires, dont une variété d’hépatocarcinome, et sur l’adénocarcinome prostatique. Mais l’absence d’études cliniques ne peut actuellement autoriser à les recommander comme seul traitement antitumoral ! L’Épilobe ne saurait se dispenser des médicaments bloqueurs-hormonaux, de la chirurgie dans certains cas, et de la chimiothérapie en cas d’évolution métastatique, pelvienne, ou osseuse en particulier.

Pour rester dans le domaine génito-urinaire, les Épilobes -plantes en rapport avec l’eau- protègent le système urinaire des infections et inflammations. Etant antibactériens sur les entérobactéries comme le Colibacille et le proteus mirabilis qui sont les plus fréquents responsables d’infections urinaires, ils sont indiqués dans les cystites récidivantes autant que la classique CALLUNE. On les prescrira aussi dans la prostatite chronique (dont le point de départ est toujours infectieux). Leur effet anti-inflammatoire sera précieux pour désenflammer la vessie après une cystite, et lorsque qu’une cystoscopie réalisée dans le cadre d’un bilan d’hématurie, aura visualisé une « vessie inflammatoire  ».

=> Les Épilobes sont anti-inflammatoires du tractus digestif, indiqués dans la gastrite et les colites. En conjuguant ses propriétés anti-infectieuses sur les entérobactéries, anti-inflammatoires, et antisécrétoires sur la muqueuse colique, ils sont un des meilleurs remèdes de diarrhées, et de gastro-entérites saisonnières.

=> Plusieurs sources d’ethnomédecine (amérindienne ou russo-sibérienne) recommandent les Épilobes dans la bronchite, la grippe et les « coups-de-froid  ». Comme d’autres plantes septentrionales tel le SERPOLET (qui est le « Thym du Nord » utilisé dans le Diacalamentum) ou la REINE des PRES, plante eurasiatique des lieux humides et froids, dont les Salicylés qu’elle contient en fait un bon fébrifuge...on pensera aux Épilobes pour traiter les maladies contractées par le froid humide.

USAGE CULINAIRE

 En période de disette, les rhizomes d’Épilobe, qui sont comestibles, ont été réduits en farine et utilisés pour faire des galettes.
 Les jeunes poussent se mangent en « asperge » ou en salade (Marie-Claude PAUME).
 Les feuilles sèches d’Épilobe servaient à faire une infusion en Russie appelée « Thé de Kapporie » (François COUPLAN). Il existe toujours en Sibérie un thé fermenté de « feuilles de saule » d’Épilobe dont la saveur rappelle le thé noir fumé-fermenté qu’il fallait importer de Chine.

RECOLTE

 Récolter la partie supérieure de la plante entière (tige, inflorescence, et feuilles) sauf la partie basse de la tige avec son rhizome, afin de permettre le renouvellement de cette plante vivace.
Utiliser au maximum la plante fraîche pour son emploi médicinal.
Sinon, faire sécher la plante dans un local aéré, et conserver dans des bocaux de verre à l’abri de la lumière, ou dans des sachets en papier, pour en disposer l’hiver.
 Cueillir seulement les feuilles fraîches pour les indications cutanées
 Cueillir encore les feuilles, à faire sécher, pour consommer comme « Thé d’Épilobe ».

EMPLOI MEDICAL et POSOLOGIE

 en INFUSION des parties aériennes de la plante fraîchement ceuillie, ou à défaut de plante séchée ; 2 cuillères-à-café par tasse de 150 ml, verser l’eau bouillante sur la plante, laisser infuser 10 - 15 minutes x 2 à 3 fois par jour (seulement matin au lever et le soir pour Maria TREBEN) par cures de plusieurs semaines dans les indications digestives, urinaires ou prostatiques du remède.
 en DECOCTION de feuilles (20 à 50 g/Litre soit 2%-5%) en usage externe de compresses imbibées sur des plaies ou des ulcères.
 en TEINTURE MERE d’EPILOBE à PETITES FLEURS : EPILOBIUM PARVIFLORUM TM : 30 à 50 gouttes matin et soir (soit 3 à 5 ml/24H) dans le traitement de l’hypertrophie bénigne prostatique (HBP) avec troubles mictionnels. par cures prolongées de 3 semaines par mois, pendant plusieurs mois.
 en EXTRAIT de PLANTE FRAÎCHE
 ou en GELULES d’Epilobium angustifolium 200mg posologie 3 à 4 gélules /j (2 gélules x Matin et soir)

Associations judicieuses :
Dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate, et les troubles mictionnels qualifiés de « prostatisme », il est favorable d’associer, et d’alterner par cures l’EPILOBE :
 au PRUNIER d’AFRIQUE (Pygeum africanum)
 au PALMIER de FLORIDE ou SAW PALMETTO (Sabal serrulata)
 ou à l’HUILE de PEPINS de COURGE
(pour les formes galéniques et les posologies, nous renvoyons au site de Phytomania référencé dans la Webographie).

Contrindications : aucune.

PHARMACOPEE FRANCAISE

L’Épilobe n’est pas référencée dans la Liste A de la Pharmacopée française de Janvier 2019

une station d’Epilobes en épi sur le Plateau d’Ally,
(Haute-Loire, 43)

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1) Bibliographie générale

Jan VOLAK, Jiri STODOLA « Plantes Médicinales » p. 148
Vaclav VETVICKA « Plantes des champs et des forêts » p. 198-199
Maria TREBEN « La Santé à la Pharmacie du Bon Dieu » 45° éd. 1994, p. 22-26
Pr J-P CHAUMONT, Dr J-M MOREL « Se soigner avec les plantes de Bourgogne » p. 88-89
Jacques FLEURENTIN « Du bon usage des plantes qui soignent » p. 312-313
François COUPLAN « Le régal végétal : plantes sauvages comestibles » p. 185-186
Marie-Claude PAUME « Sauvages et comestibles » p. 124-127
Sélection du READER’S DIGEST « Secrets et vertus des plantes médicinales » p. 129
Joseph E. PIZZORNO, Michael T. MURRAY « Texbook of Natural Medicine » 4° éd. 2013 ; Chap. 89 : Epilobium species (Fireweed) / Kathy ABASCAL & Eric YARNELL, p. 735-737

2) Ouvrages anciens

Nicholas CULPEPER « The British Physician » 1652, ré-intitulé « Complete Herbal », 1653, § Great flowered Willow-Herb

Nicolas LEMERY « Traité universel des Drogues simples » 1723, § Chamaenerion epilobium p. 220

Paul-Victor FOURNIER « Dictionnaire des Plantes Médicinales et vénéneuses de France » 1947 ; ré-éd. 2010, p. 372-373

3) Articles scientifiques

(Classés en ordre chronologique, des plus anciens aux plus récents)
En langue anglaise, l’Epilobe est nommée « Fireweed » ou « Willow herb ».

MIYAMOTO K, NOMURA M, SASAKURA M, MATSUI E, KOSHIURA R, MURAYAMA T, FURUKAWA T, HATANO T, YOSHIDA T, OKUDA T. « Antitumour activity of oenothein B, a unique macrocyclic ellagitannin » Jpn J. Cancer Res. 1993 Jan ; 84(1) : 99-103 (Hokuriku University, Kanazawa, Japan)

LESUISSE D, BERJONNEAU J, CIOT C, DEVAUX P, DOUCET B, GOURVEST FJ, KHEMIS B, LANG C, LEGRAND R, LOWINSKI M, MAQUIN P, PARENT A, SCHOOT B, TEUTSCH G. « Determination of oenothein B as the active 5-alpha-reductase-inhibiting principle of the folk medicine Epilobium parviflorum » J. Nat. Prod. 1996 May ; 59(5) : 490-92 (Centre de Recherche ROUSSEL UCLAF, Romainville, France)

DUCREY B, MARSTON A, GÖHRING S, HARTMANN RW, HOSTETTMANN K. « Inhibition of 5-alpha-reductase and aromatase by the ellagitannins oenothein A and oenothein B from Epilobium species » Planta Med. 1997 Apr ; 63(2) : 111-14 (University de Lausanne, Switzerland)

HIERMANN A, SCHRAMM HW, LAUFER S. « Anti-inflammatory activity of myricetin-3-O-beta-D-glucuronide and related compounds » Inflamm. Res. 1998 Nov ; 47(11) : 421-27 (University of Graz, Austria)

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STOLARCZYK M, PIWOWARSKI JP, GRANICA S, STEFANSKA J, NARUSZEWICZ M, KISS AK. « Extracts from Epilobium sp. herbs, their components and gut microbiota metabolites of Epilobium ellagitannins, urolithins, inhibit hormone-dependant prostate cancer cells-(LNCaP) proliferation and PSA secretion » Phytother. Res. 2013 Dec ; 27(12) : 1842-48 (b) (Medical University of Warsaw, Poland)

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SCHEPETKIN IA, RAMSTEAD AG, KIRPOTINA LN, VOYICH JM, JUTILA MA, QUINN MT. « Therapeutic potential of Polyphenols from Epilobium angustifolium (Fireweed) » Phythoter. Res. 2016 Aug ; 30(8) : 1287-97 (Montana State University, Bozeman, USA)

OSTROVSKA H, OLESHCHUK O, VANNINI S, CATALDI S, ALBI E, CODINI M, MOULAS A, MARCHYSHYN S, BECCARI T, CECCARINI MR. « Epilobium angustifoliumL. : a medicinal plant with therapeutic properties » The EuroBiotech J. 2017 May ; 1(2) : 126-31 (Ivan Horbachevsky Ternopil State Medical University, Ternopil, Ukraine & University of Perugia, Italy & T.E.I of Tessaly, Larissa, Greece)

PIWOWARSKI JP, BOBROWSKA-KORCZAK B, STANISLAWSKA I, BIELECKI W, WRZESIEN R, GRANICA S, KRUPA K, KISS AK. « Evaluation of the effect of Epilobium angustifolium aqueous extract on LNCaP cell proliferation in in vitro and in vivo models » Planta Med. 2017 Oct ; 83 (14-15) : 1159-68 (Medical University & Warsaw University of Life Sciences, Poland)

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VITALONE A, ALLKANJARI O. « Epilobium spp : pharmacology and phytochemistry » Phytother. Res. 2018 Jul ; 32(7) : 1229-40 (Sapienza University of Rome, Italy)

PRASAD K, MANOHAR P, KAVITA Y. « A Review on phytopharmacological potential of Epilobium angustifloium » Pharmacogn. J. 2018 ; 10(6) : 1076-78 (Marathwada Mitra Mandal’s College of Pharmacy, Maharashtra, Indra)

WEBOGRAPHIE

https://fr.wikipedia.org/wiki/épilobe_en_épi

https://fr.wikipedia.org/wiki/épilobe_à_grandes_fleurs

https://fr.wikipedia.org/wiki/épilobe_à_feuilles_de_romarin

https://fr.wikipedia.org/wiki/Epilobium_parviflorum

https://fr.wikipedia.org/wiki/Epilobium_obscurum

http://www.wikiphyto.org/wiki/Epilobe_à_feuille_étroite

http://www.wikiphyto.org/wiki/Epilobe_à_petites_fleurs

https://www.altheaprovence.com/blog/epilobe-epilobium-angustifolium/

https://www.phytomania.com/prostate.htm

www.doctissimo.fr/html/sante/phytotherapie/plante-medicinale/epilobe.htm

Par Dr Dom COQUERET

Publié le jeudi 7 février 2019

Mis à jour le mercredi 3 novembre 2021